J’ai envie de vous montrer comment se passe cette procession vers Rocio. Depuis Sanlúcar, elle dure presque 3 jours, ce qui demande une grande organisation !
Je vous avais déjà raconté le départ du pèlerinage du Rocio, auquel j’ai participé depuis Sanlúcar de Barrameda. Ce pèlerinage a lieu chaque année pour Pentecôte, donc l’édition 2019 approche.
Qui dit pèlerinage dit forcément chemin, camino ici. Les pèlerins rejoindront Rocio par différents chemins depuis leur ville d’origine ; évidemment la grande majorité des pèlerins est andalouse. N’oubliez pas que le village de Rocio va accueillir environ un million de pèlerins pendant 3 jours, pour la sortie de la Vierge du Rocio !
On se déplace à pied bien sûr, mais aussi à cheval, en carrioles, en voitures, en longs convois.
La procession vers Rocio
Comme on le voit, la carriole de la Vierge de Sanlúcar, surmontée de la Paloma Blanca, avance dans le sable, tirée par des taureaux. Le convoi se déplace au rythme de la Paloma.
Les plus fervents des pèlerins entourent leur Vierge, marchent en touchant en permanence cette carriole. Tous les autres la suivent, dans la poussière.
Chaque Hermandad (fraternité – en France on parlerait d’une association de quartier) dispose d’une roulotte, tirée par un tracteur puissant.
Cette roulotte a plusieurs fonctions.
– elle transporte les valises, matelas et tentes sur son toit
– elle contient tout le ravitaillement pour les trajets et le séjour à Rocio, soit 8 jours, pour une cinquantaine de personnes.
– un espace à l’avant de la roulotte (porte ouverte en haut de l’échelle sur la photo) est dédiée aux robes et autres tenues. On dirait un vrai dressing ! n’oubliez pas que les femmes du pèlerinage changent de tenue chaque jour, revêtent leur robe immaculée chaque matin, assortie aux accessoires obligatoires que sont châles, bijoux et fleurs.
– elle transporte les passagers qui ne marchent pas, dont les 5 personnes affectées à l’intendance, et quelques pèlerins non marcheurs, dont moi.
Évidemment, chaque journée de procession est ponctuée d’arrêts, pour les messes, le ravitaillement des animaux et des pèlerins.
Les étapes de la procession vers Rocio
Il faut bien sûr célébrer la Vierge en route pour Rocio, et les prêtres de Sanlúcar, qui font partie des pèlerins bien sûr, disent la messe 2 fois par jour. C’est toujours l’occasion de chants magnifiques, accompagnés au tambour, à la guitare et à la flûte.
Et puis vous devinez bien que la spiritualité ne suffit pas, et qu’il faut toute la journée nourrir et abreuver chevaux et pèlerins.
Tout le matériel est installé par les 4 personnes affectées aux étapes. En un rien de temps, la plancha ou les friteuses, tables et nappes sont installées à l’ombre. Et il s’agit de vrais festins. Crevettes, tranches de lomo, cotelettes de mouton, plats mijotés préparés auparavant et réchauffés, salades diverses, gâteaux ou fruits.
Les boissons ? bière ou vin. Qu’on ne se méprenne pas, le vin est uniquement de la Manzanilla, la grande boisson locale de Sanlucar de Barrameda. J’ai découvert ainsi le rebujito, boisson rafraichissante, composée de Manzanilla et limonade.
Les soirées de la procession
Alors là, c’est une autre histoire.
Imaginez environ 5000 personnes qui s’installent pour un bivouac, dans un parc naturel, donc sans aucun équipement en eau, électricité et bien sûr toilettes.
Donc, quelques dizaines de roulottes s’arrêtent pour la nuit, dans un lieu autorisé, avec les 4X4 et les carrioles.
C’est le moment de vider tout ce qui se trouve sur le toit de la roulotte, et de s’installer pour la nuit ; le moment de nourrir et soigner taureaux, mules et chevaux ; de préparer le repas…
Les tentes se déplient…. chacun s’installe avant de passer à table… et la soirée va être longue, très longue… grand moment hallucinant.
Vous devinez bien qu’il fait bon, et que le repas (fort copieux, délicieux) est bien accompagné de bières et Manzanilla. Alors, les guitares ne sont jamais loin, et les soirées sont animées, musicales et joyeuses.
Quand enfin vous vous couchez, après les derniers chants, dans votre abri de fortune, vous croyez dormir… grave erreur. Il faudra composer avec le bruit des groupes électrogènes, l’humeur des chevaux, et le passage des sangliers, à l’affût de tout ce qui pourrait être grignoté… Autant dire que les nuits sont courtes…
C’est là que les Espagnoles m’impressionnent. Vous imaginez, vous, qu’elles puissent sortir de leur tente au petit matin avec une nouvelle robe impeccable, le maquillage et le chignon comme si elles sortaient d’un institut ? Cela restera un grand mystère pour moi…
La sécurité sur le chemin du Rocio
Cette procession s’est déroulée en grande partie dans le parc national de la Doñana . Les organisateurs ont déposé en amont une autorisation spéciale, qui est évidemment accordée. Comment ne pas pèleriner pour la Vierge du Rocio ?
Les lieux où s’arrêter sont donc pré-définis de façon stricte, aussi bien pour l’arrêt déjeuner que pour les étapes nocturnes.
Plusieurs véhicules assurant la sécurité accompagnent la procession.
Une équipe médicale, dans plusieurs véhicules, est disponible pour les pèlerins. Ils procèdent aux premiers secours, et sont capables d’évacuer vers Sanlúcar ou Rocio les blessés qui en ont besoin. Une fille de notre groupe s’est cassé la jambe en tombant de cheval, et j’ai été impressionnée par l’efficacité de leur intervention.
Un camion vétérinaire aussi. Vu le nombre important de chevaux qui participent au pèlerinage, c’est une évidence.
Enfin, un camion poubelle pour remettre le parc en état après chaque étape.
C’est une sacrée intendance un pèlerinage !
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Il faut marcher presque 3 jours pour rejoindre le village de Rocio depuis Sanlúcar, et donc camper 2 fois dans chaque sens. Heureusement, il y des sièges disponibles dans chaque roulotte pour accueillir les marcheurs fatigués, qu’ils soient de leur hermandad ou pas.
Cette procession restera un grand souvenir, par la dévotion observée, et parce que la fraternité « hermandad » n’est pas un vain mot.
Et encore, je n’avais pas encore vécu les 3 jours dans le village de Rocio, au milieu de centaines de milliers de pèlerins.